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TEARS TO SHED, à sa première version fut fondé par Elvira, Yoric et Charles. Il est le nouveau-né d'une longue lignée (qui existe depuis février 2008) de forums basés sur le thème des Chronicles of Pirates of the Caribbean. Le design fut réalisé par Elvira, et certaines œuvres graphiques restent néanmoins la propriété de Forumactif. Toute copie, partielle ou complète est sévèrement punie par la loi, et ainsi : strictement interdite. Le contenu du forum revient aux membres du staff, ainsi qu'aux membres de TTS, veuillez respectez leur travail. A la V2 du forum, l'équipe administrative à été remaniée suite au départ de Charles, et est composée d'Elvira, Yoric, et de deux nouvelles têtes : Grace et Cutler. (Ajout de juillet 2011 : ajout d'Elizabeth au staff, suite au départ de deux de ses membres. )
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 Visite surprise [Yo-chou]

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Miss Grace E. Beckett
«Admin : DUCHESS »
Miss Grace E. Beckett
♠ Parchments : 83
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MessageSujet: Visite surprise [Yo-chou]   Visite surprise [Yo-chou] Icon_minitimeVen 4 Fév - 1:25

Tout à coup, tout devint extrêmement lumineux. Les rayons du soleil de midi inondèrent la pièce d’un seul coup, tandis qu’une domestique ouvrait en grand les rideaux de la chambre. Déjà si tard. Déjà midi. Il était évident que Grace n’avait pas l’habitude de se lever à une heure si tardive. Cependant, ce jour-là était différent. Elle avait passé la pire nuit de sa vie. Une terrible migraine avait décidé subitement, aux alentours de minuit, de l’empêcher de dormir, et ce n’est que bien des heures plus tard, alors que déjà le petit jour se dessinait à l’horizon, que Grace, épuisée, avait fini par tomber de sommeil dans un fauteuil.

Aveuglée par la lumière trop vive et trop soudaine, la jeune femme grimaça tout en se cachant sous son oreiller. Elle ne voulait pas se lever. Elle était fatiguée, de mauvaise humeur, et son mal de tête lui avait laissé une affreuse sensation de vide. Grace détestait ce genre d’impression. Elle se leva à contre cœur, et alla s’asseoir à sa coiffeuse. Ce petit meuble en bois sculpté lui avait coûté une petite fortune, et elle adorait s’y installer des heures, à contempler son reflet, dans le miroir. Cependant, et c’était une réalité constante depuis quelques temps, elle n’aimait plus autant s’admirer. Il lui semblait qu’elle n’était pas aussi belle qu’elle avait pu l’être, et cela l’ennuyait.
Elle avait dans la soirée un dîner chez une voisine. Celle-ci ne recevait que rarement du fait de son grand âge, mais l’occasion c’était présentée lorsque l’un de ses neveux, originaire de France, lui avait annoncé son arrivée prochaine à Port Royal dans le but de la visiter. Cela faisait déjà deux semaines que Grace se préparait pour cette soirée. Elle avait fait préparer une robe spécialement pour l’occasion, et l’apprentie couturière la lui avait apportée la veille. Lorsqu’une telle soirée se préparait, Grace annulait systématiquement tous ses rendez-vous de la journée. Il fallait du temps pour être parfaite, et elle n’était pas sans savoir qu’une préparation précipitée était souvent la cause de bien des étourderies qui pouvaient aisément être évitées.

Vous vous étonnerez peut-être de savoir que Grace déjeuna beaucoup ce jour-là. Les dîners organisés regorgeaient souvent de mets succulents, et si l’on ne connaissait pas bien les usages, il eut été facile de se laisser tenter à se priver de manger pour avoir suffisamment faim le soir. Si Grace faisait l’inverse, c’était justement parce qu’il pouvait être extrêmement gênant de manger trop dans ce genre de soirées. Il était d’une grossièreté impardonnable de montrer plus d’appétit qu’un homme, et en ayant bien mangé au déjeuner, elle ne risquait pas d’être tentée par les odeurs et les plats appétissants.
Elle mangea vite, cependant. Il était déjà tard, et elle avait besoin de tout le temps possible pour être prête à l’heure. Malgré sa fatigue, Grace gagnait peu à peu en bonne humeur. Il lui semblait finalement que la journée ne serait pas si mauvaise. Une nouvelle robe, des bijoux à faire pâlir de jalousie n’importe quelle fille de riche hypocrite et stupide, et tout cela dans le but d’impressionner. Elle était impatiente, sûrement. Elle adorait ce genre de soirée, elle était dans son élément. Pour rien au monde elle n’aurait renoncé à se montrer. Pour rien au monde elle n’aurait laissé sa place à une autre. Plus elle croisait son reflet dans les nombreux miroirs de sa demeure, et plus elle était persuadée d’être tout à fait irremplaçable. Grace était unique en son genre. Peut-être sa confiance en sa beauté était-elle un atout. Peut-être n’était-elle pas si exceptionnelle, après tout. Mais elle avait su sortir du lot. N’était-ce pas cela qui comptait le plus ?

Debout dans son boudoir, Grace était entourée d’une dizaine d’habilleuses qui se hâtaient autour d’elle. L’organisation complète de la maison était chamboulée. Plus rien ne tournait rond, quand Grace renonçait au thé de cinq heures pour se préparer. Margaret s’activait dans tous les sens, tandis que la jeune femme inspirait autant qu’elle en était capable pour permettre à l’habilleuse de gagner quelques centimètres sur son corset. Celui-ci, bien que voué à resté caché sous la délicieuse robe de velours rouge, était tout de même décoré de dentelles blanches, à l’image de la passion dévorante de Grace pour cet art. Il sembla cependant à Grace que quelque chose n’allait pas. Car lorsqu’il fut totalement serré et attaché solidement, elle se sentit défaillir, et il fallut relâcher d’un bon centimètre pour qu’elle puisse respirer. Cet incident, bien que mineur, mît Grace dans un état de nervosité incontrôlable, comme si c’était une nouvelle gravissime.
Elle avait grossi. Imperceptiblement peut-être, mais suffisamment pour qu’elle se sente soudainement fautive. Elle avait sûrement trop mangé de macarons. A moins que cela ne soit le sucre qu’elle ajoutait à son thé ? Faisant claquer ses talons sur le sol de marbre du couloir, elle traversa la demeure d’un pas rapide et ouvrit la porte des cuisines à grands fracas.

« Votre cuisine n’est pas bonne ! Veillez à l’avenir à ne servir que des plats légers. Le thé est NATURE. Et à partir de demain, les friandises sont bannies de votre vocabulaire, me suis-je bien fait comprendre ?! »

Les cuisiniers, dérangés en plein travail, fixèrent avec effarement la jeune femme, rouge de colère, qui venait d’entrer. Dans ses élans impulsifs, Grace oubliait parfois la décence, et se retrouver en corset, fut-il de soie ou d’or, devant ses employés, était au comble de l’inconvenance. Plus énervée contre elle-même que contre eux, elle repartit comme elle était venue, en claquant la porte. C’est à ce moment là, alors qu’elle traversait un couloir, que l’on annonça une visite. Grace s’arrêta tout net, et se tourna vers Margaret d’un air effaré.

« Attendons-nous quelqu’un ? »

Comme Margaret lui fit non de la tête, le courroux de Grace se dirigea droit vers le pauvre portier, qui avait eu le malheur de la regarder un peu trop intensément. Elle planta son regard de glace dans le sien d’un air outré qui le fit reculer.

« Et bien ! Qu’attendez-vous ! Faîtes monter ! »

Le jeune homme repartit à la porte sans demander son reste, et Grace reprit d’un pas pressé la route de son boudoir. Elle n’était pas présentable, et encore moins d’humeur à recevoir, mais sa curiosité était piquée au vif, et elle n’avait pu se résigner à faire renvoyer le visiteur, quel qu’il soit. Elle avait tout juste le temps de mettre sa robe, pour ne pas avoir l’air complètement indécente. Une jolie robe de velours rouge, relativement simple, comparativement à d’autres pièces de sa garde robe, mais suffisamment habillée pour une soirée de ce genre. Les manches en dentelles n’étaient pas encore totalement fixées qu’une dame de chambre venait avertir Grace que le visiteur était dans le salon et l’attendait.
Elle n’était ni coiffée, ni maquillée, et les retouches de sa robe n’étaient clairement pas encore effectuée, mais elle ne pouvait décemment pas faire attendre des heures quelqu’un. C’est ainsi que, traversant le petit couloir qui séparait le boudoir du salon, elle laissa le soin à un domestique d’annoncer son arrivée.

« Miss Beckett arrive, Monsieur »

Elle n’attendit pas un instant de plus pour franchir la porte et entrer. Elle ne vit pas au départ qui se tenait face à elle, et profita de ces quelques secondes pour s’excuser poliment.

« Veuillez m’excuser pour ma tenue, je dois admettre que votre visite m’a pris de court et que je… elle s’interrompit en reconnaissant son interlocuteur, et resta muette une seconde… Vous… ? »

Si elle s'était attendue à ça... Non pas qu'elle était en colère, ou quoi que ce soit, mais la surprise était trop grande, elle n'avait même pas imaginé une seule seconde que celui puisse être lui...

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MessageSujet: Re: Visite surprise [Yo-chou]   Visite surprise [Yo-chou] Icon_minitimeSam 5 Fév - 8:06



Yoric s’essuya les mains sur sa chemise qui fut, quelques heures au part avant, d’un blanc immaculé. Elle portait maintenant de très nombreuses éclaboussures, ainsi que la trace des ses mains qui laissait une longue trainée d’un rouge écarlate. Il fallait vraiment qu’il pense à porter autre chose que du blanc, c’était vraiment trop salissant. Et pourtant, il adorait le blanc, et chaque matin, il continuait à revêtir une nouvelle chemise immaculée. Elles lui faisaient ressembler à un ange, un ange de la mort. Le jeune irlandais regarda encore l’homme, ou plutôt ce qu’il en restait, qui était entrain de geindre de douleur sur la table qui occupait la plus grande partie de l’espace de la pièce avant de se passer la main dans les cheveux. Encore un qui ne tiendrait pas une nouvelle entrevue avec lui.

    On se revoit demain.. A la même heure et au même endroit.. Je penserai aux petits fours cette fois-ci. Tachez de retrouver l’usage de votre langue pour que la mort soit clémente et douce pour vous.. Sinon, croyez-moi bien, ce que nous avons fait aujourd’hui n’est rien, rien du tout comparé à ce que je peux vous faire.


Yoric adressa un dernier sourire à sa victime avant d’ouvrir la porte du cachot avec violence. Faisant signe au garde le plus proche de s’occuper du prisonnier, il prit la direction de la sortie. Sa journée, qui avait été très courte, était déjà terminée. Le travail manquait un peu ses temps-ci, et les prisonniers se faisaient rares. Il y avait bien les rares exécutions publiques, mais il devait reconnaître que ce n’était pas ce qu’il préférait. Qu’un être comme lui puisse se réjouir du malheur et de la mort des autres, c’était parfaitement normal, mais que des gens, qu’ils soient nobles ou pauvres, considérés comme normaux puisse voire cela comme un spectacle, il n’avait jamais compris. C’était surement une des raisons pour lesquelles il pouvait a ce point apprécier Grace.
Grace… Penser a elle venait de lui ramener quelque chose a la mémoire. Il avait toujours chez lui, sur sa table de chevet juste à coté de lui, un objet qui lui appartenait, un éventail pour être exacte, qu’elle avait oublié lors de leur dernier entretient dans un des restaurant de la ville. Elle était tête en l’air, mais c’était un défaut charmant, ou tout du moins, elle le rendait charmant. Yoric avait cet éventail depuis désormais plusieurs semaines, et il n’avait pas encore eut le courage de le rapporter à sa propriétaire. Étrange n’est-ce pas, qu’un bourreau, bien plus grand que la majorité des hommes, soit légèrement effrayé par une femme, Ce sentiment remontait a il y a déjà bien longtemps, lorsqu’il s’était rendu a Singapour pour affaires. Elle l’avait marqué a jamais par sa force de caractère et sa beauté, elle lui faisait, en réalité perdre tous ces moyens. Quand il lui avait avoué, bien des années plus tard, qu’il n’était pas ce qu’il avait dit être, la belle était rentrée dans une colère folle et avait refusé de le ravoir ou même d’entendre parler de lui. Il était donc bien normal que le jeune homme soit légèrement inquiet de la visite, courtoise ou non, qu’il allait devoir lui faire. Certes il s’était « réconciliés »mais rien n’était moins sur. Mais il fallait bien qu’il y aille, un jour ou l’autre. Qu’est ce qu’elle pouvait lui faire de toute façon. Elle n’allait quand même pas lui crier dessus parce qu’il lui ramenait un éventail qu’elle avait oublié ? Yoric c’était décidé, il allait passer, et aujourd’hui !
C ‘est donc avec un léger sourire sur les lèvres qu’il traversa la ville en direction de sa petite demeure, sous les yeux étonnés des habitants de Port Royal. Et oui, il ne fallait surtout pas oublier que le bourreau était immense et avait la chemise ensanglantée comme jamais ; voir passer un homme habillé de la sorte avec un sourire sur les lèvres pouvait paraître étrange. Le jeune irlandais poussa enfin la porte de chez lui, non sans avoir salué sa voisine d’un grand sourire et d’un petit geste de la main. Avant de se rendre chez mademoiselle Beckett, il avait besoin de se changer, et de se laver. Une petite heure plus tard, le jeune homme prenait la route pour son petit enfer personnelle, propre comme un sous neuf, et vêtu d’une chemise plus blanche encore que la neige. Il avait a la main, l’éventail de Grace et trouvait que cette tenue lui allait étrangement bien. Quand enfin il frappa trois coups secs sur l’immense porte de bois, son cœur battait la chamade, et il se sentait prêt à faire demi tour si dans les trente secondes qui suivaient, personne ne lui ouvrait. Malheureusement pour lui, un homme apparu dans l’entrebâillure de la porte.

    Monsieur désire-t-il quelque chose ?
    Yoric lui sourit doucement. J’aurais souhaité voir mademoiselle Beckett, si elle est la évidemment.
    Veuillez entrez monsieur, Je vais vois si elle est la monsieur.


Le bourreau suivit donc le portier jusque dans le hall et s’arrêta, au beau milieu. Il ne s’aperçut même pas que l’homme était parti tellement ce qui l’entourait était… Grandiose. Leurs deux mondes se heurtaient, une fois de plus. Jamais encore il n’avait vu pareille beauté, et il était persuadé, que bien des personnes, quelques parts sur Terre avaient des hall d’entrée encore plus impressionnants que ca. Quelques minutes plus tard, des bruits de pas le firent sortirent de ses pensées.

    Si monsieur veut bien se donner la peine de me suivre, mademoiselle vous recevra à l’étage. Yoric sourit, une fois de plus, et grimpa les grands escaliers avant de se retrouver dans un salon. Miss Beckett arrive, Monsieur.


Et bien soit, il attendrait. Pas très longtemps d’ailleurs, il avait a peine eut le temps de contempler la pièce qui l’entourait que la demoiselle fit son apparition.

    Veuillez m’excuser pour ma tenue, je dois admettre que votre visite m’a pris de court et que je… Vous… ?


Yoric sourit d’amusement avant de s’incliner devant sa tendre amie. Elle était belle, et quoi qu’elle puisse penser de sa tenue, elle était magnifique. Il était vrai que sa coiffure n’était pas faite, que le maquillage était absent, et que la robe était loin d’être parfaitement mise, mais le plaisir de la voir était tel, qu’elle aurait pu être revêtu d’une chemise rouge de sang et marron de boue, qu’elle aurait continué a être sublime et même si sa voix de disait rien, ses yeux parlaient pour lui.

    Oui… Moi. Je suis navré mademoiselle, j’aurais du penser a vous prévenir dans la matinée, mais ma visite est toute aussi imprévue pour moi. Si je vous importune, je peux repasser plus tard…


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MessageSujet: Re: Visite surprise [Yo-chou]   Visite surprise [Yo-chou] Icon_minitimeMar 15 Fév - 1:22

Il existe des gens à double facette. Qui se jouent d’un côté de leur caractère sans se soucier des conséquences, et qui, parfois, apparaissent sous un jour totalement différent. Ces gens-là inquiètent. Quand on croit les connaître, il n’est pas rare qu’on se trompe et c’est une chose qui généralement, agace. Il faut du temps, de la patience, et du courage pour percer le caractère d’une personne double. On ne parle pas là de schizophrénie chronique, ni même d’un fou. Il s’agit simplement de la capacité d’une personne à cacher ce qu’elle est au reste du monde afin de s’élever dans l’échelle sociale. Le mot qui qualifierait le mieux ce genre de personne serait probablement « hypocrite ». Ce ne serait certainement pas faux, si on le prend dans ce sens. Mais il ne faut pas généraliser. L’hypocrisie est considérée comme un défaut, et rebute beaucoup de monde, comme s’il s’agissait d’un péché dramatique et qui mériterait la mort.
Dans le cas de Grace, il ne fallait pas s’y méprendre. Elle n’était fourbe, ni vicieuse. Seulement méfiante, ambitieuse et maline. Elle savait exactement ce qu’elle voulait, et si pour y parvenir elle devait s’appliquer à se donner un caractère différent, cela ne lui faisait pas peur, même s’il fallait renier certaines de ses idées. Les sacrifices ? Elle était prête à les faire. Tous. Tant qu’elle gardait son piédestal. Rencontrer Grace, c’est comme se prendre un boulet de canon en pleine tête. Pas toujours très agréable.
Bon, elle avait certes une tendance à se montrer cassante, détachée, stupide parfois. Elle n’était peut-être pas tout à fait comme cela, en vrai. Quand on enlevait les masques, et qu’on faisait le point. Peu de personnes la connaissaient vraiment. D’ailleurs, peu de personnes se donnaient la peine d’essayer de la connaître. Elle aurait tout perdu, si on apprenait qu’elle avait une sainte horreur des exécutions publiques, ou si elle avait avoué qu’elle n’aimait pas particulièrement la danse. Ainsi, le peu d’amis qu’elle avait lui permettait d’être un peu plus vraie, de temps en temps.
Peut-être que cela ne lui manquait pas vraiment, en réalité. Elle s’était tellement prise au jeu que des fois elle avait l’air complètement idiote, même dans le cercle privé. De plus, même derrière le masque qu’elle s’était construit, Grace était loin d’être un ange. Dépensière, narcissique et insouciante, elle devait bien admettre qu’elle n’avait pas eu à faire grand-chose pour être la parfaite lady mondaine. Non, vraiment pas grand-chose.

C’était sûrement une des raisons qui la poussait à se demander pourquoi Yoric lui avait accordé son amitié. S’il avait été un véritable gentleman, comme il le lui avait affirmé au départ, elle aurait compris. Elle n’était pas laide, et plutôt agréable, si on en restait sur un plan strictement courtois, dans les salons mondains et les dîners de galas. Mais qu’un homme tout à fait ordinaire se soit donné tant de mal pour la connaître sans vouloir profiter de sa position pour s’élever socialement, ça la dépassait complètement. Qu’est-ce qui avait bien pu pousser Yoric, quand il l’avait vue la première fois, à inventer ce mensonge grotesque pour l’approcher ? Son physique y était probablement pour quelque chose, car connaissant le jeune homme, elle était persuadée que la personnalité d’enfant gâtée égocentrique et capricieuse qu’elle affichait alors n’était certainement pas ce qui l’avait attiré.
Elle ne s’en plaignait pas. Elle appréciait vraiment Yoric. Suffisamment pour accepter de le voir malgré l’immense fossé qui les séparait. Peut-être était-il d’ailleurs la seule exception à son intransigeance dans ses relations. Une drôle d’exception, n’est-ce pas ? Et pourtant, quelques mois plus tôt, elle l’aurait tué de ses propres mains s’il avait croisé par malheur son chemin, tant elle était en colère contre lui. Ce n’était d’ailleurs pas tant son mensonge qui l’avait énervé que l’embarras dans lequel il la mettait. Elle tenait à son amitié, déjà à Singapour, et si elle n’avait pas pensé à lui durant toutes ces années, c’était sûrement lié à sa consommation délirante d’alcool. Mais comment espérait-il qu’elle réagisse en apprenant qu’il était pauvre, et bourreau par-dessus le marché ? Il représentait à lui seul tout ce que Grace pouvait détester. Quelqu’un sans argent, sans héritage, sans noblesse, comme tous ceux qu’elle fixait d’un air hautain en marchant dans la rue. Et il était bourreau. Un métier pareil n’aurait sûrement pas gêné ses ‘amies’ qui se plaisaient à aller assister aux exécutions publiques comme s’il s’agissait d’une pièce de théâtre d’un nouveau genre. Quant à Grace, ce métier la dégoutait, et elle ne pouvait souffrir de se rendre à une exécution, ni même d’en entendre parler. Sa sainte horreur du sang ne faisait que rajouter à l’absurdité totale de leur relation. Elle-même n’expliquait pas sa propre tolérance. Peut-être s’était-elle adoucie avec le temps ? Cette hypothèse était assez peu probable, compte tenu de son comportement général. Il s’agissait clairement d’une histoire entre eux, au-delà même de ses habitudes et de ses préférences. Elle avait mis du temps à l’accepter. A se dire que ce n’était peut-être pas aussi mal qu’il y semblait à première vue. Elle avait aimé sa compagnie, dans les rues de Singapour, quelques années plus tôt. Il n’avait pas tant changé. Non, la seule différence, c’était qu’elle savait. C’était suffisant. Cela avait failli tout gâcher. Ce qui l’avait poussée à accepter son invitation ? Elle n’en avait pas la moindre idée. Elle avait répondu, et c’était tout. Elle ne le regrettait pas.

Ce jour-là cependant, Grace était à mille lieux de penser à Yoric. Car quand Grace commençait à se préparer pour une fête, rien d’autre ne comptait. Elle quittait totalement le monde, comme si elle vivait une expérience hors du commun. Pas si extraordinaire que cela pour elle, à l’évidence, étant donné la fréquence de ce genre de dîners. Mais elle anticipait ces journées, les attendaient avec impatience, se montrait nerveuse, angoissée dans la nuit qui les précédaient. Tout se jouait dans sa capacité à se préparer. Elle rêvait d’atteindre la perfection. Et là où d’autres avaient déjà jeté l’éponge, elle s’obstinait encore et encore. On lui avait pourtant dit souvent qu’elle était magnifique, parfaite ou tout simplement ravissante. Mais cela ne lui suffisait pas. Que tous les visages se tournent vers elle à son entrée dans une pièce ? C’était déjà le cas, de toutes manières. Non. Ce qu’elle voulait, c’était bien plus que cela. Ce qu’elle voulait c’est que les femmes s’évanouissent de jalousie en la voyant, et que personne, non personne n’ose plus jamais la défier, comme c’était arrivé quelques fois dans le passé. Elle avait toujours eu raison de ses rivales. Vous devriez pourtant connaître Grace, maintenant. Elle était narcissique. Terriblement sûre d’elle-même. Et ce soir-là, elle allait à nouveau briller, comme toujours. Sa secrète espérance était en réalité de marquer tellement fort les esprits de chacun que le lendemain, on ne parlerait plus que d’elle dans les rues de Port Royal. Un rêve qui pourrait devenir réalité si elle restait suffisamment concentrée sur ce qu’elle faisait.
Malheureusement, la préparation pour la soirée tourna au drame quand Grace réalisa qu’elle avait grossi. C’était une chose tellement inacceptable qu’elle aurait pu en faire une syncope et même refuser de sortir de chez elle, de peur qu’on ne le remarque. Il n’y avait certes que peu de chances que cela arrive. Mais que ferait-elle sur une espèce de vieille commère s’en rendait compte ?

Si elle ne s’attarda pas plus longtemps sur le sujet, c’est qu’on lui annonça une visite. Une visite. Non mais franchement ! Laquelle de ses voisines ignorait donc qu’elle avait un dîner extrêmement important dans la soirée ? Ce n’était probablement pas le bon moment pour arriver. Mais Grace avait un don pour apparaître en public comme si de rien était, et enfila donc sa robe pour accueillir son invité, qu’elle ne pouvait décemment recevoir en simple corset, fut-il de soie. Elle aurait pu avoir honte si, en se regardant dans le miroir du couloir, elle n’avait pas trouvé son petit air négligé tout à fait charmant. Peut-être lancerait-elle une tendance plus naturelle à l’avenir, qui aurait pu le savoir ? Elle avait le temps d’y réfléchir, de toutes les manières.
En entrant dans le petit salon de réception, elle s’attendait à tout sauf à y voir Yoric. De un, parce qu’il ne venait jamais chez elle, ils se retrouvaient ailleurs, et de deux parce qu’il ne lui avait absolument pas parlé d’une éventuelle visite. Pas un mot. Rien du tout. S’il voulait la surprendre, et bien c’était réussi !

« Oui… Moi. Je suis navré mademoiselle, j’aurais du penser a vous prévenir dans la matinée, mais ma visite est toute aussi imprévue pour moi. Si je vous importune, je peux repasser plus tard…

Grace resta un instant interloquée. Incapable de réagir tout de suite, plus par lenteur d’esprit que parce qu’elle était réellement choquée, elle le fixa avec un air tout à fait ahuri. Il arrivait à peine qu’il voulait déjà repartir ? Tout de même… c’était un peu rapide, même pour une simple visite de courtoisie.
Après quelques secondes interminables, Grace secoua lentement la tête et fit un pas vers lui, en tendant sa main, comme pour lui dire de ne pas partir.

« Non !... je…attendez… »

Rosissant légèrement de sa confusion, Grace baissa les yeux avec un léger sourire. Décidément, il fallait qu’elle se méfie de cet homme, il avait tendance à la mettre dans un état tout à fait hors de l’ordinaire, sans même avoir à faire un geste, c’était très gênant. Retrouvant rapidement contenance, Grace s’installa sur le divan le plus proche, sans le quitter des yeux.

« Vous venez d’arriver ! Installez-vous plutôt… Vous voulez du thé ? Des gâteaux peut-être ? Ou autre chose ?»

Pas très conventionnel comme invitation, elle devait bien l’admettre. Etonnement, elle n’arrivait juste pas à être ‘normale’ quand il était dans les parages. Quand ils étaient dehors, encore, elle arrivait à peu près à gérer. Mais chez elle. Dans son monde… ça devenait bien plus compliqué. Elle ne savait jamais comment se comporter avec lui depuis qu’elle était au courant de sa véritable identité. Tout était tellement plus simple dans les salons mondains qu’elle fréquentait ! Il suffisait de suivre un code, des règles établies, et cela marchait à merveille. Mais dans la vie. Dans la vie normale… cela lui paraissait presque impossible d’être totalement naturelle. Comme si cela n’était justement pas dans sa nature. Devait-elle continuer de se conduire avec lui comme lorsqu’il se prétendait gentleman ? Ou devait-elle changer de comportement ? C’était la question qu’elle se posait à chaque fois qu’elle le croisait, et à laquelle elle n’arrivait pas à trouver de réponse.
Qui aurait cru que quelqu’un pourrait mettre Grace mal à l’aise ? C’était assez surprenant, en fait. Car tant qu’il faisait parti du même « monde », Grace n’avait eu aucun problème à converser avec lui. Mais depuis qu’il n’était plus que « Yoric », elle était comme tétanisée à chaque fois qu’elle le voyait. Bien sûr, ça, elle ne l’aurait avoué pour rien au monde, et le cachait de son mieux, en gardant un visage de marbre, légèrement souriante.


« Vous ne me rendez pas souvent visite, n’est-ce pas ? Vous devriez venir plus souvent…, un instant pensive, Grace retrouva rapidement le fil de ses idées, je suppose que ce n’est pas simplement pour me voir que vous vous êtes déplacé, n’est-ce pas ? »

Un léger pincement au cœur, Grace baissa les yeux. Peut-être espérait-elle un peu qu’il venait juste pour elle. Ridicule, n’est-ce pas ? Des dizaines d’hommes dix fois plus riches seraient ravis d’être invités chez elle. Pourquoi était-ce lui alors qui en avait le privilège ? Elle préférait ne pas y penser. Ce genre de débat mental lui donnait la migraine et elle n’avait aucune envie de se lancer là-dedans.
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MessageSujet: Re: Visite surprise [Yo-chou]   Visite surprise [Yo-chou] Icon_minitimeDim 20 Fév - 7:32


Pour la première fois depuis que la demoiselle était venue s’installer a Port Royal, Yoric venait de mettre les pieds, de pauvre sans aucun statut social, dans la demeure de miss Beckett. Il ne fallait surtout pas penser qu’il n’en avait pas eut l’envie par le passé, bien loin de la même ; mais jamais l’idée ne lui avait réellement traversé la tête. Peut-être une fois ou deux juste âpres leur dispute, mais c’était tout. Apres tout, depuis qu’il lui avait avoué la vérité, et rien que la vérité aussi dur soit-elle a dire et a entendre, ils n’étaient plus du même monde. Il était bourreau, rebu de la société, et elle était aristocrate. Ils n’avaient rien à faire ensemble, encore moins sous le toit de la demoiselle. Toujours est-il qu’il était la, dans son salon, a contempler la femme la plus merveilleuse qu’il avait jamais rencontré, et pourtant, D.ieu seul savait combien de femme Yoric avait pu rencontrer. Elle était donc la, en face de lui, a le regarder comme s’il avait été un fantôme. Un sourire amusé s’installa sur le visage du bourreau. Il était lui même entrain de se demander ce qu’il faisait ici, ce n’était pas vraiment ca place, et il ne comprenait pas ce qui l’avait pris ; il savait qu’il devait rendre l’éventail a Grace, mais il n’aurait pas été oblige pour cela de se rendre a son domicile. Et pourtant il l’avait fait, malgré toutes les conséquences que cela pouvait amener. Yoric avait donc a présent une chose a rajouter sur sa liste, qui semblait interminable, des folies qu’il avait effectuer pour la demoiselle. Depuis leur toute première rencontre, sans avoir ne serait-ce que l’ombre d’une idée du pourquoi du comment, le jeune homme avait su qu’il fallait qu’il lui parle, c’était une obligation, s’il ne le faisait pas, il risquait de s’en vouloir toute sa vie. Elle était agréable a regarder, très agréable même, c’est un peu ce qui l’avait poussé a lui mentir, lui faisant croire qu’ils venaient du même monde. Et encore une fois aujourd’hui, il avait effectué une folie. Si la demoiselle le renvoyait, ou si jamais un garde l’attrapait a sa sortie, il risquait de se retrouvait en très mauvaise position. Comment pouvait-il expliquer qu’il connaissait, plus que bien, la sœur de Cutler Beckett ?
Elle le regardait donc, ayant beaucoup de mal à réaliser à qui elle faisait face, et lui, son sourire toujours aux lèvres, il était sérieusement entrain de penser qu’il était surement mieux qu’il parte, aussi rapidement qu’il était arrivé. Finalement, avant qu’il se décide à tourner les talons, la jeune femme secoua légèrement la tête et fit un léger pas dans sa direction, la main tendue en avant.

    Non !... je…attendez…


Le sourire du jeune homme s’agrandit un peu plus. Il pouvait voir qu’il n’était pas le seul a faire des folies ou perdre ses moyens en l’instant présent, loin de la. Les joues de Grace s’étaient légèrement teintées de roses, preuve qu’elle n’était pas a l’aise. Elle ne devait très probablement pas savoir ce qu’elle devait faire en de telle situation. Elle finit par s’asseoir sur un divan sans pour autant rompre le contact de leur regard. Il était assez drôle de voir la jeune femme perdre tous ces moyens fasse a lui, depuis qu’il n’était plus que lui, et non pas un gentleman, elle n’avait jamais vraiment réussi a cacher sa véritable personnalité avec lui, mais depuis quelques temps, c’était pire.

    Vous venez d’arriver ! Quelle perspicacité étonnante ! Yoric n’avait jamais douté de l’intelligence de la demoiselle, mais la, c’était fulgurant ! Installez-vous plutôt… Vous voulez du thé ? Des gâteaux peut-être ? Ou autre chose ?


Le jeune homme inclina très légèrement la tête vers Grace et se dirigea vers un fauteuil faisant face à divan ou était déjà installé la jeune femme. C’était une invitation bien peu conventionnelle, mais il n’en avait rien a faire, elle voulait qu’il reste, elle ne l’avait pas jeter dehors sans plus de cérémonie, de qui était un très bon signe.

    Un thé serait parfait miss. Il avait d’ailleurs une préférence pour le thé noir fort a souhait, et même s’il avait révélé ce petit détail lors d’une après-midi a Singapour, il ne s’attendait pas à ce que Grace s’en rappelle. Quant aux petits gâteaux, bien que l’idée est charmante, je ne voudrais absolument pas abuser de votre hospitalité. Je me suis déjà permis de m’inviter alors que vous semblez très occupée… A vous préparer pour une soirée surement ? Je ne voudrais pas vous retenir trop longtemps, et je ne voudrais pas gâcher le plaisir qu’auront vos hôtes à vous voir resplendissante comme à votre habitude.


Sa phrase avait été longue. Surement la plus longue qu’il ne lui ait jamais dite. Il n’était pourtant pas du genre à tergiverser trois cents ans sur un sujet et s’entêtait, dans ses conversations, a s’en tenir au stricte minimum, encore plus lorsqu’il était en compagnie aussi haute placée. Il avait en quelque sorte peur de passer pour un imbécile si jamais il venait a manquer de vocabulaire. Ne savoir ni lire ni écrire ne l’avait jamais vraiment déranger, sauf en ces moments la. Il se savait aussi savant sur certains domaines que bien des aristocrates. Si jamais on lui demandait de parler du corps humain, il en savait bien plus qu’un anatomiste, si on lui demandait des conseils pour faire pousser des plantes et lesquelles il fallait, ou ne fallait pas utiliser pour sa cuisine, on pouvait avoir en ses réponses une confiance aveugle, et cela s’étendait sur bien d’autre domaine. Mais si on lui demandait de composer un poème, d’écrire une lettre d’amour ou ne serait-ce même que de parler devant un auditoire pour le divertir, il en était bien incapable. Reconnaissons le, dans sa profession et sa vie quotidienne, ces petits défauts n’avaient absolument aucune importance.

    Vous ne me rendez pas souvent visite, n’est-ce pas ? Vous devriez venir plus souvent… La jeune femme fit une pause, ce qui laissa le temps a Yoric de méditer sur cette phrase. Ils venaient de passer plus de sept mois à s’éviter et à ne pas se parler. Le bourreau n’osait même pas imaginer quelle aurait pu être la réaction de la demoiselle s’il avait osé se présenter à sa porte durant ce moment de froid. Je suppose que ce n’est pas simplement pour me voir que vous vous êtes déplacé, n’est-ce pas ?


Elle venait de baisser les yeux. Le jeune homme ne laissa rien paraître sur son visage, comme bien souvent d’ailleurs, mais son esprit lui, s’était mis a fonctionner a toute vitesse. Si elle avait commis tel geste, c’est qu’elle aurait voulu, d’une façon ou d’une autre qu’il ne soit venu que pour pouvoir la contempler à sa guise. Yoric s’installa un peu plus confortablement dans le fauteuil tout en posant une de ses mains sur l’accoudoir. Elle lui avait donc pardonné ce qu’il était et son mensonge.

    Je vous demande de m’excusez pour mes rares visites, mais notre relation n’a pas toujours été parfaite… Et je ne pense pas que mes entrées et sorties de votre maisons passeraient toujours inaperçues. Il essayait de lui faire comprendre, assez maladroitement, qu’ici, il lui était impossible de prétendre qu’il n’était pas ce qu’il était. En ce qui concerne la raison de ma visite… Je me suis enfin décidé a ramener ce qui vous appartiens. Il se leva et avança de quelques pas, retirant d’une de ses poches l’éventail de la demoiselle qu’il lui tendit. Vous l’aviez oublié sur la table du restaurant. Je suis d’ailleurs désolé de vous le rendre aussi tard.

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